Les enquêtes financières parallèles, un critère important pour mesurer l’engagement de l’État dans la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (M. Daki)

Rabat – Les enquêtes financières parallèles constituent un critère important pour mesurer l’engagement de l’Etat dans la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, a affirmé, mercredi à Rabat, le Procureur général du Roi près la Cour de Cassation, président du Ministère public, El Hassan Daki.

Intervenant lors d’une conférence nationale sur le thème : “Enquête financière parallèle sur les crimes de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme à la lumière des nouveautés apportées par la loi n°12-18”, M. Daki a expliqué que l’enquête financière parallèle et son succès dans la confiscation des produits du crime est un critère important pour mesurer l’engagement de l’État concernant les exigences de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, conformément aux critères du Groupe d’action financière, relevant qu’il s’agit aussi d’un facteur déterminant dans l’évaluation des pays au niveau international.

La Présidence du Ministère public accorde une grande importance à ces enquêtes, en incitant le parquet à charger la police judiciaire de mener parallèlement des investigations financières en faisant l’inventaire des biens immobiliers et mobiliers des prévenus et de leurs comptes bancaires et en vérifiant le lien entre le crime et les biens, en plus d’utiliser les conclusions de l’évaluation nationale des risques pour orienter la recherche vers les crimes sous-jacents à haut risque, a souligné le président du Ministère public au cours de cette rencontre, organisée par l’Autorité nationale du renseignement financier.

Selon M. Daki, il est nécessaire pour les procureurs de demander l’assistance de l’Autorité nationale du renseignement financier concernant toutes les preuves et informations pouvant être utiles à l’investigation, et de mettre en oeuvre les procédures de saisie et de gel dans les affaires de blanchiment d’argent, du financement du terrorisme et des crimes sous-jacents, tout en respectant les droits d’autrui.

A cet égard, il a abordé les nouveautés apportées par la loi n° 12-18 modifiant et complétant le Code pénal et la loi n° 43-05 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, notamment la généralisation de la compétence en matière d’infractions de blanchiment aux tribunaux de Casablanca, Fès et Marrakech, estimant que cette généralisation contribuera à améliorer la cadence et l’affinement de l’investigation et d’atteindre l’efficacité judiciaire dans le traitement des affaires liées au blanchiment d’argent, en plus d’accompagner les efforts visant à renforcer les mécanismes d’investigation et d’enquête sur ce type de criminalité, notamment après la création d’équipes régionales de police judiciaire spécialisées dans les infractions financières et économiques dans les villes de Rabat, Casablanca, Fès et Marrakech.

M. Daki a fait remarquer, dans cette optique, que les modifications législatives et les mécanismes institutionnels, bien que nécessaires, ne suffisent pas à eux seuls à réduire les risques émergents d’infractions de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, à identifier les auteurs et à les traduire en justice, soulignant l’importance de consentir des efforts tangibles au niveau de la qualification et du développement des compétences des différents acteurs intervenant dans ce domaine, en particulier les services chargés de mener les recherches et les enquêtes.

Par ailleurs, le président du Ministère public a estimé que la formation et la qualification des ressources humaines en charge de lutter contre les crimes de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme constituent une étape importante dans la lutte contre ces phénomènes criminels, notamment le développement des capacités des organes chargés d’enquêter sur ces crimes et de mener des enquêtes financières parallèles, qui figurent parmi les principales recommandations approuvées par le Groupe d’action financière pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient dans le rapport d’évaluation mutuelle sur le Maroc.

“La réussite de ces organes au cours de l’investigation et de l’enquête sur l’un des crimes sous-jacents, en ouvrant une enquête financière parallèle à l’enquête pénale traditionnelle pour identifier et suivre les produits financiers du crime et en saisissant les organes et institutions compétents pour révéler leurs comptes bancaires et leurs biens immobiliers et mobiliers en vue de fournir des preuves liant ces produits financiers au crime sous-jacent, contribuera inévitablement à améliorer l’efficacité judiciaire dans les affaires de blanchiment d’argent, à traquer les fonds et produits et à priver les criminels d’en tirer profit”, a-t-il fait observer.

“La criminalité financière est généralement caractérisée par la complexité et la difficulté de fournir la preuve, qui nécessite une combinaison de méthodes d’investigation classiques, d’investigation financière parallèle ainsi que des techniques spéciales d’investigation”, a indiqué M. Daki, relevant que le succès de l’enquête financière parallèle à appuyer l’enquête criminelle dépend en grande partie de la coordination et des efforts concertés entre les différents services de surveillance et de contrôle, les personnes assujetties, l’Autorité nationale du renseignement financier, le Ministère Public et la Police Judiciaire.

Cette conférence, à laquelle ont participé des magistrats, des membres de la Présidence du Ministère public, des officiers de police judiciaire, des juristes et des spécialistes dans la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, vise à renforcer la coordination et à étudier les modalités de coopération entre tous les acteurs intervenant dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et discuter des mesures permettant d’augmenter l’efficacité du système judiciaire et de mesurer sa compatibilité avec les normes internationales.